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« Les temps modernes ». N°842

Écrit par sur 6 juin 2018

Capture d’écran 2018-06-06 à 06.35.45« Vivre une autre vie c’est aussi vouloir vivre un autre temps. » disait tout récemment dans une librairie parisienne Jacques Rancière en présentation de son dernier livre « Les temps modernes » (Editions La Fabrique). Nous pourrions retenir cette formule pour le dernier livre de Jacques Josse, « Débarqué » édité aux éditions Contre-allée. La raison à cela est que dans l’un comme dans l’autre il est question de temps – entretien avec Jacques Josse à écouter ici.

Capture d’écran 2018-06-05 à 17.42.43Dans les deux cas il y est en effet question de la prise en compte de la dimension du temps. Formulée bien sûr très différemment, philosophiquement ardu pour l’un, poétiquement et à la portée de tout lecteur pour l’autre. Rancière reprend l’idée du philosophe Emerson qui « donne une des premières et des plus radicales formulations: le temps moderne est un temps qui n’est pas encore contemporain de lui-même: c’est pour cela qu’il a besoin de l’art et c’est ce qui donne à cet art son caractère d’articulation de temporalités contradictoires » (p 60).

« Conflit des temps » dit Rancière – à écouter -, entre une époque enfermée dans le présent, le temps du pouvoir et de la prospérité capitaliste qui liquide les acquis sociaux, le temps des « experts qui savent », le temps de ce «futur déjà présent» toujours précaire, le temps déterminé par la logique de l’inégalité; et l’autre, le temps de l’assignation aux journées de travail, à leur répétition et à la vie dite ordinaire, le temps soumis au règne de la nécessité, ce temps, le nôtre.

C’est bien ce que révèle l’art littéraire de Jacques Josse en écrivant ce voyage dans le temps. Qui, d’une durée qui va des années 60 aux années 2000, est celui de son père qui, assigné à son hameau près de Plouha (22) pour raison de santé, ne cessera sa vie durant de penser au voyage et à en lire les récits. Et quand Josse nous raconte le temps de son village d’enfance où se vit, au milieu du cours «normal» du temps, une manière d’habiter le monde sensible en commun – que l’on nomme trop souvent être « une vie ordinaire » mais « qui souvent l’est moins »-, Rancière quant à lui montre dans ses pages que du sein même de la vie ordinaire miroite parfois le « tissu sensible de vie nouvelle« , fait de fragments de temps qui sont déjà des fragments de sens.

Dans une temporalité commune avec celui-ci, « Débarqué » de Jacques Josse apporte remarquablement à la démonstration philosophique des éléments de ce « tissu » de sens.

D.D

ru Ce qui a été écrit et dit ici-même autour du temps.


Les opinions du lecteur
  1. Françoise   Sur   7 juin 2018 à 8 h 56 min

    « Un autre temps »
    « prise en compte de la dimension du temps. »
    « Fragments de temps »
    Dis-tu. Rancière/Josse. Entièrement d’accord avec toi.
    Et tu attends le : « Mais… » ou « Toutefois… »
    Non, non, au contraire, ce que je veux ajouter, c’est qu’à la même date, Rancière fait paraître un autre livre : »La méthode de la scène » (avec Adnen Jdey).
    Et là, il est question d’espace, de « reconfiguration de l’espace ».
    Et on se retrouve dans les règles inspirées du théâtre antique :
    « Qu’en un lieu, qu’en un jour, un seul fait accompli » (Boileau, l’Art poétique)

    Le hameau, la route sinueuse, le café d’en face, la cuisine et le paquet de Bergerac de Jacques Josse constituent « l’épaisseur du tissu sensible et intelligible qui donne au lieu (Rancière dira « le tableau ») « sa puissance sensible de condensation ».
    Dans l’écriture de Jacques Josse il y a « l’œil au travail » dans une « perpétuelle poursuite » …
    La « poursuite », « dans les arts de la scène, désignant un projecteur orientable pour suivre sur le plateau l’acteur en mouvement » (Rancière)

    « …Quelques balises qui clignotent au loin et, par temps clair, le trait lumineux de la ligne d’horizon qui bascule vers le grand large. »(Débarqué. Jacques Josse)
    Et la mer. Et la lumière. Donc.

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