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Fin de l’histoire ? N°1.

Écrit par sur 20 novembre 2009

La semaine passée a été consacrée à fêter les 20 ans de la chute du mur de Berlin, de la chute des pays soviétiques et de la réunification allemande. On a vu les figures importantes de l’époque ( Gorbatchev, Walesa…) réapparaître à l’occasion et se joindre aux dirigeants actuels. On a fêté, la réunification allemande, donc. Moment joyeux de retrouvailles. Moment charnière pour l’Europe, aussi. Mais ce qui a été fêté sans le dire explicitement, c’est aussi la victoire du capitalisme. A l’époque, en 89, ce n’était pas seulement la réunification qui avait lieu. C’était l’Ouest, l’économie de marché qui s’imposait au bloc que l’on appelait communiste. Dans des accents hégéliens on parlait alors de la « Fin de l’histoire », le capitalisme triomphant était désormais voué à devenir l’unique, l’éternel modèle que les pays du monde entier était destinés à adopter. Il était présenté comme la fin du film. Toutes les péripéties, les tragédies, les amours, les inventions de l’histoire humaine devaient se conclure à cela. Le capitalisme devait devenir notre seconde peau, aussi naturel que l’air que l’on respire. D’ailleurs, depuis la chute du mur, le mot « capitalisme » avait progressivement disparu des discours, notion trop imprégnée de sa critique, le mot rappelait trop l’hypothèse qu’il pouvait y avoir d’autres formes d’organisation de la société. Alors on euphémisait, on en parlait de façon allusive, le mot était devenu presque tabou… Et ce pendant les vingt dernière années, ou plutôt les dix-neuf dernières années. Jusqu’à ce qu’il réapparaisse de manière fulgurante dans les bouches, il y a un an, avec l’éclatement de la bulle immobilière américaine et le krach financier qui s’ensuivit.

Et c’est dans ce contexte de crise sociale, économique et politique que l’on a fêté cet anniversaire… Et la fête a pris une drôle d’allure, oui, un drôle de sens, genre on fête la fête qu’on a faite en 89 parce qu’ aujourd’hui, il y a de quoi faire la gueule. Il y a moins d’un an, le capitalisme, dans tous les pays, a tremblé comme jamais il n’a tremblé depuis le jeudi noir de 1929. ( Sur ce point, il n’a sûrement pas fini de trembler ) Là où il y a encore quelques années on percevait comme des fous, des attardés ou des rabats-joie ceux qui continuaient sa critique, l’hypothèse de son effondrement s’est réouverte brutalement aux yeux de tous. Pourtant, et cela fait longtemps que la chose a été comprise, le capitalisme a ceci de particulier que, laissé à lui-même, il est voué à s’écrouler sous ses propres contradictions. Sa logique est autodestructrice. Rajoutons que le problème avec cela, c’est qu’il a le mauvais goût de vouloir nous entraîner avec lui. Et c’est là où la fête de la semaine dernière prend cette drôle d’allure. Avec la chute du mur et sa victoire, plus rien ne pouvait le contenir. Plus rien ne pouvait le contrarier. On allait alors désormais avoir affaire à sa logique débridée. Logique immédiatement perceptible pour les pays de l’Est où quasiment tout était démantelé et privatisé, jusqu’au dernier clou.

Ce n’est donc pas un hasard si ce que l’on appelle le néolibéralisme a investi la tête des dirigeants des pays occidentaux, dans les années 70, au moment même où les pays communistes se lézardaient de partout. Ce n’est pas un hasard aussi si sa mise en oeuvre a coïncidé avec la disparition des formes communistes. Qui n’existaient pas seulement à l’Est mais aussi à l’Ouest, dans l’Etat-Providence, la redistribution des richesses créées, la mise en place de services publics ( école, santé, culture…), la réglementation beaucoup plus stricte du rôle de la finance. Des politiques économiques keynésiennes, qui injectaient du socialisme et de la réglementation en vue de trouver un équilibre. Bref un capitalisme bridé par des formes de sociale-démocratie et la France en est ( était ?) un bon exemple. Et c’est à cela que s’est attaqué et continue de s’attaquer systématiquement, depuis les trentes dernières années, les politiques néolibérales menées par les Etats et institutions internationales. Avec, pour objectif, donc, de débrider le capitalisme. En slogans, ça donne « la rupture », « libérer la croissance », etc…

Bref l’idéologie néolibérale ( celle des Hayek, Friedmann, Mises…), on peut le dire, est avant tout et a toujours été une histoire de déréglementation. Il s’agit toujours de supprimer les réglementations en place afin de renforcer les pouvoirs de ceux qui les ont déjà. On désserre la ceinture de ceux qui ont le pouvoir, on resserre celle des autres. Le tour de passe-passe, c’est de faire croîre que ça profitera à tout le monde… Comme le dit P. Jaurion, « le libéralisme est la philosophie spontanée des milieux d’affaire » ( lien revue du Mauss ) , des capitalistes, dirions-nous, pas de ceux qui triment. Donc, par exemple, cela signifie que le « Travaillez plus pour gagner plus » se découpe en deux. Le travaillez plus, ça c’est pour ceux qui travaillent et qui perdent. Le gagner plus, ça c’est pour ceux qui gagnent déjà ( les capitalistes ). Qui a dit que les gouvernants actuels ne tenaient pas leurs promesses ? Les banquiers, traders, patrons de grandes entreprises… n’ont jamais autant gagné qu’aujourd’hui, en pleine crise…du capitalisme. Le problème, c’est qu’à force d’oublier ce qu’avaient dit Marx ou Keynes, entre autres… tout cela nous rapprochait toujours plus d’un nouvel effondrement de l’économie. Le problème aussi, c’est que de cet effondrement de l’économie, ceux qui en sont les premiers responsables, ceux qui détiennent les capitaux sont aussi ceux qui ne le vivent pas….

M.D


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