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« Face à Gaïa ». N°755

Écrit par sur 5 octobre 2016

SPACE HURRICANE MATTHEWL’heure n’est plus à la surprise car la vérité est bien là: l’ouragan Matthew de puissance 4 sur une échelle de 5, qui est considéré comme le plus dangereux de ces dernières années, les rafales atteignent jusqu’à 230km/h, ou les étranges températures que nous constatons apparaissent pour le moins comme des excès préjudiciables. Mais qui peut en rester à ces constats ?

De quoi vérifier amplement la justesse des propos d’un auteur français actuellement le plus cité et le plus traduit au monde, l’anthropologue des sciences et philosophe Bruno Latour. Ses conférences sont compilées dans un nouveau livre « Face à Gaïa. Huit conférences sur le Nouveau Régime Climatique », aux Editions Les Empêcheurs de penser en rond.

Un ouvrage qui tend d’éclairer au mieux ce qui est peut-être l’affaire la plus grave de notre temps  : la ­catastrophe écologique globale. Mieux connue sous la ­notion de « réchauffement climatique ». Catastrophe puisqu’elle entraîne une perte de biodiversité, on parle d’« extinction massive » .

En s’appuyant sur les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) , pour Latour un nouvel acteur est arrivé dans l’histoire humaine – la Terre  !

latourLa Terre qu’il nomme Gaïa. Non pas Nature -qui sert de pendant à la subjectivité humaine-, ni Globe, ni Terre-Mère, il s’en explique. A ceci près qu’il choisit ce nom au-delà de sa signification mythologique (le nom de la déesse Gaïa, vieux mythe grec). En fait, il reprend le concept de Gaïa développé dans les années 70 par James Lovelock, qui permet d’attirer notre attention sur la particularité de notre planète : par l’ensemble des vivants qui la composent, elle est devenue elle-même vivante ; elle est réactive, sensible, « extrêmement chatouilleuse » (p. 319).

Chatouilleuse à un point où à la disparition d’un nombre anormal d’espèces vivantes, à la montée du niveau des mers, à l’augmentation de la température, ou au franchissement d’un seuil irréversible de production de CO2, Gaïa répond à sa façon.

Et pour la comprendre, qui peut parler à sa place avec quelque autorité ? Alors ça passe par une traduction en langage humain grâce à des instruments et études scientifiques. De laquelle découle une nouvelle ère géologique appelée l’Anthropocène. Qui met en exergue les graves conséquences des activités industrielles sur la Terre.

C’est ainsi que nous sommes même « devenus ceux qui auraient pu agir il y a trente ou quarante ans et qui n’ont rien fait ou si peu ».

10887055Bien voir une chose nous rappelle Latour, Gaïa est composée de tous les êtres qui l’habitent. Qui sans elle ne peuvent pas vivre. Pour appeler les habitants de Gaïa, il propose le terme de «Terrestres ». Ceux-ci n’existant qu’à travers des connexions. Sachant que c’est en fonction de celles-ci que certaines formes de vie émergent, et que d’autres disparaissent. En un mot ça interagit. Sachant aussi qu’à chaque changement Gaïa change. Et qu’il est difficile d’en prévoir les manifestations.

Faut-il encore préciser que parmi les Terrestres, nous autres les humains ? Nous sommes ses enfants et nous n’avons nul autre lieu où aller.

Bruno Latour rappelle que, obsédés par ces idéaux fondés sur l’exploitation des ressources, enfermés dans nos croyances aux mécanismes du marché, à l’intangibilité des États-nations et à la supériorité de la Science, nous ces Humains qui sont en conflit avec les Terrestres -que nous sommes aussi-, avons été incapables de comprendre l’importance de la Terre et de la défendre, comme incapables de « nous rendre sensibles à la mortalité, à la finitude », en admettant que nous ne sommes pas « seuls aux commandes ».

Vous aurez peut-être noté que selon l’auteur « … c’est devant Gaïa que les Terrestres cherchent l’émancipation ». Et nous dit-il encore dans ce livre au titre qui m’est apparu au premier abord assez énigmatique: « Ceux qui affirment que la Terre n’a pas seulement un mouvement mais aussi un comportement qui la fait réagir à ce que nous lui faisons, ne sont pas tous des foldingues qui auraient versé dans l’étrange idée d’ajouter une âme à ce qui n’en a pas ».

D.D

Dit et écrit ici-même autour de la COP 21 et l’ Arctique.
Et notre entretien avec Gilles Clément.


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