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17 mars, « Journée du théâtre. » N°1038

Écrit par sur 30 mars 2022

En 2010, la société Murray Hill Inc. exigea que les politiques qui font semblant de gouverner cessent de se donner en spectacle.

Un peu plus tôt, la Cour suprême des Etats-Unis avait déclaré que les entreprises qui financent les campagnes électorales des hommes politiques ne violent pas la loi; et depuis longtemps déjà, les pots-de-vin reçus par les législateurs à travers les lobbies étaient légaux.

Appliquant le bon sens, Murray Hill Inc. annonça qu’elle présenterait sa candidature au Congrès des Etats-Unis pour l’Etat du Maryland. L’heure était venue de se passer d’intermédiaires : « C’est notre démocratie. Nous l’avons achetée. Nous l’avons payée. Pourquoi ne prendrions-nous pas le volant ? Votez pour nous, pour avoir la meilleure démocratie que l’argent puisse acheter. »

Nombreux furent ceux qui pensèrent qu’il s’agissait d’une plaisanterie. Vraiment ? »

Eduardo Galeano, journaliste, penseur et passeur de mots – « 27 mars : Journée du théâtre. » tiré de son livre « Les enfants des jours. »

« Chaque jour a une histoire à raconter », c’est ainsi que se présente « Les enfants des jours ». Dont la page consacrée au « 27 mars » est titrée « Journée du théâtre » – reproduite ci-dessus. « Faisant fi des frontières et du temps, chaque page de ce livre raconte une histoire tirée de la longue biographie de l’humanité ».

Au jour d’aujourd’hui de mars, la tonalité de cette « Journée du théâtre », si joliment nommée, m’amène comme en écho à celle du 17 mars dernier. Jour où, ici en France, a été rendu public le rapport du Sénat sur les cabinets de conseils privés qui officient au plus haut sommet de l’Etat. Et qui donc s’occupent des affaires du pays, laissant aux politiques la scène théâtrale.

Ce 17 mars en voici l’histoire : l’affaire McKinsey & Company, du nom du cabinet de conseil américain.

Rendu public le 17 mars, le rapport du Sénat sur le recours aux cabinets de conseil par l’État, décrit « sur des pans entiers des politiques publiques », « un phénomène tentaculaire », « une relation de dépendance » entre l’État « qui donne le sentiment qu’il ne sait plus faire », « un réflexe », « même lorsque l’Etat dispose des compétences en interne », et les cabinets de conseil très grassement payés, dépassant le milliard d’euros de dépenses en 2021. Le champ d’action de ces cabinets privés interroge : la réforme des APL, la réforme des retraites, la formation des jeunes, la centralisation des données médicales, les cahiers de doléances des Gilets Jaunes, etc… Exemple : pas moins de sept cabinets de conseil ont épaulé le ministère de la Santé pour gérer la crise sanitaire !

« Les propos d’Emmanuel Macron traduisent une grande fébrilité », note le président de la commission d’enquête « le milliard d’euros identifié par le Sénat ne regroupe qu’une partie seulement des dépenses de conseils ». S’ajoute à cela que le rapport du Sénat pointe également que le cabinet de conseil américain McKinsey, n’aurait versé aucun impôt sur les sociétés de 2011 à 2020, « un exemple caricatural d’optimisation fiscale », alors que le cabinet a réalisé un chiffre d’affaires de 329 millions d’euros en France en 2020. En totalité ses bénéfices sont versés sur un compte ouvert dans un paradis fiscal et du coup se trouve perpétuellement en déficit. Bref, question « fébrilité » voire complicité, affaire à suivre.

Quittant momentanément sa posture de soldat d’opérette, notre président-candidat entortillé dans ce possible McKinseyGate, invoque le respect du Code des marchés publics. Bref, question suspicion de favoritisme, ou prestations incohérentes avec l’objet du marché et le cahier des charges, autre affaire à suivre. Cela dit, pour quelque raison que ce soit quant à la procédure suivie, cela n’exclut nullement le mauvais calcul rétrospectif. Le monde est plein d’experts imbéciles dont l’impact ne peut se réduire à des simples broutilles. Ce qui est le cas. Pas du meilleur effet à l’heure où l’incontinence mentale inonde la campagne présidentielle.

Appliquant le bon sens, si la société McKinsey & Company annonçait, comme sa consoeur Murray Hill Inc., son souhait à son tour de se passer d’intermédiaires et de prendre le volant, personne ne la croirait. Pour cause, c’est elle qui manoeuvre ! Que rêver de mieux ?

Mais à la manoeuvre de quoi au juste est-elle ? De ce que cette « scène théâtrale » laissera comme trace. La trace de ce que le corps garde comme traces de son rapport au labeur. Il s’agit du corps de la classe ouvrière, de ses conditions d’assignement aux forces de l’industrie. A un monde où la pénibilité du travail, son caractère infernal de par la répétition du geste, ses cadences et conditions inhumaines font sans cesse face au danger. A la trace des rapports au travail, sur les complexes de classe, sur le corps ouvrier, celui de la classe ouvrière à celui vieillissant et cicatrisé de ces conditions d’assujettissement et de résilience.

D.D

Ce qui a été dit et écrit ici-même autour d’ Eduardo Galeano. Ainsi qu’autour d’ Emmanuel Macron, et de la trace des rapports au travail avec l’écrivaine Fabienne Swiatly.

 


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