L’Annelies Ilena, « le navire de l’enfer « . N°1204
Écrit par admin sur 11 juin 2025
L’Onu meurt d’impuissance (Gaza, Ukraine, Soudan,..), alors comment croire que la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc) qui se tient ces jours-ci à Nice, ait des chances de parvenir à autre chose qu’à de beaux discours, car sans les Etats-Unis trop avides à transformer les océans en Far West. Qui par un paraphe d’un décret présidentiel se sont ouverts la voie à l’exploitation minière des grands fonds marins – lire ici– au-delà des juridictions nationales. Au royaume de l’extractivisme sans limites, le patrimoine commun de l’humanité est plus que jamais menacé.
Quand, dans le même temps, selon un rapport intitulé «Starfish», un bulletin mondial sur la santé de l’océan – lire là–, publié à la veille de la conférence, « la mer est de plus en plus chaude, son niveau monte, les espèces déclinent et les grands écosystèmes sont menacés. » Confirmé par Emmanuel Macron, ce lundi 9 juin en ouverture de la Conférence «Si la terre se réchauffe, l’océan quant à lui est en ébullition».
A tout le moins, en matière de protection des fonds marins, La Chronique d’ici-même rappelle cette belle mobilisation, du 15 février 2024 à Saint-Malo, initiée par Bloom, l’ONG de lutte contre la destruction des océans – voir ici. Contre le chalutage de fond, cette technique de pêche, et y dénoncer « le navire de l’enfer » de la Compagnie des pêches de Saint-Malo. Ce plus grand chalutier du monde de 145 m de long pour 7 000 tonnes de poisson. Baptisé L’Annelies Ilena – lire là– il est utilisé comme usine flottante de fabrication de surimi.
Si bien que s’il y a fierté et notoriété des Malouins pour le Grand Large, l’épopée des Terre-neuvas et plus largement pour leurs armateurs – quoique « à ne pas oublier » ceci– pareille appréciation risque assez sérieusement de s’inverser. Pour s’en faire une petite idée sur le véritable prix de vos surimis industriels : l’anéantissement des écosystèmes et des animaux marins, écouter voir ici.
« La haute mer, zone de non-droit pillée par quelques États. » selon le biologiste franco-canadien, Daniel Pauly, l’un des meilleurs spécialistes des ressources marines au monde. »La haute mer est une zone de criminalité. C’est impossible à réglementer, aucune autorité nationale ne peut y intervenir. Les propriétaires de ces bateaux ne sont pas des marins, ce sont de grands armateurs aux pratiques flottantes. Leurs ouvriers ne peuvent pas se sauver. Ils viennent du sud-est de l’Asie, du Cambodge, de Thaïlande, d’Indonésie… Ce sont souvent des paysans sans terre, des jeunes qui n’ont pas de travail. On les fait boire (pour les rendre vulnérables), on leur promet des contrats mirifiques, et ils se retrouvent le lendemain sur un bateau avec leur passeport confisqué. Ils y travaillent pendant cinq ans avant de pouvoir s’en sortir. C’est ça, la pêche au thon. » (entretien à Reporterre). Pas meilleure description pour dire et ajouter que « la crise climatique n’est pas anthropogène mais capitalogène », pour reprendre la signification qu’en donne l’historien Jason W.Moore.
C’était justement pour nous sensibiliser à ces » environnements profonds qui sont menacés. Pour les protéger, ce n’est que par la connaissance qu’on pourra y arriver. » qu’en 2021, Jozée Sarrazin, chercheuse en écologie benthique au département Études des Écosystèmes Profonds de l’Ifremer à Brest, nous proposait, en pleine période Covid, « une plongée visuelle à l’intérieur d’un monde quasi-parallèle, hors du système solaire « où seules des machines peuvent pénétrer. ».
Ce documentaire « Me ‘zo ganet e-kreiz ar mor. », est à revoir là.
D.D
Ce qui a été dit et écrit ici-même autour des Abysses, et de Jason W.Moore.