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Prémisses. n°11.

Écrit par sur 12 février 2010

Aux utopies d’un monde meilleur qui adviendra et qui étaient nombreuses aux XXème siècle, à la promesse messianique d’un futur qui sera nécessairement meilleur se sont substituées les utopies noires, celles d’un avenir nécessairement moins heureux. Désormais nous allons vers le moins. Nombreux en sont convaincus et, il est vrai, chaque jour nous arrivent avec son lot de mauvaises nouvelles. Tout ne va pas pour le mieux, comme disait NTM. De la promesse d’un monde meilleur, donc, nous sommes passés aux présages d’un monde qui se dégrade inéluctablement. Comme une inversion dans la manière d’aborder l’avenir. A cette opposition symétrique sur le caractère que prendra le futur, il y a un point commun, celle de se vivre uniquement par le prisme du futur. D’un côté l’attente d’un monde meilleur qui nous fait supporter les souffrances du présent, de l’autre, l’attente d’un monde qui sera forcément pire, l’attente de la catastrophe. Dans les deux cas, la posture fait bien peu de cas du présent, qui n’est et ne restera qu’un présent, une chance. C’est une erreur d’oublier cela. Dans ce rapport tendu vers l’avenir, qu’il soit meilleur ou pire, la posture est celle du spectateur qui attend la fin du film pour savoir quel en sera le dénouement.

L’intuition ici est peut-être naïve mais elle est celle-ci. Peut-être s’agit-il de prendre la tangente. Peut-être s’agit-t-il, avant de changer le monde, de changer notre rapport au monde. Ou plutôt, pour changer le monde, changeons notre rapport au temps, de ce rapport aliénant au futur, qui ne se vit que sur le mode de l’attente. Et oui, est-ce que ce n’est pas là, finalement, que se formera la césure, le point d’inflexion. Moment poétique, moment poïétique. Là où on ne fuit plus la situation, où on ne se projette plus dans un ailleurs, pour échapper au présent. Ne plus la voir, cette situation, comme un accident, et donc ne plus se vivre comme une victime. Mais tout au contraire l’assumer et la vivre à fond pour pouvoir la changer. Pour en saisir les possibles, qui sont là, juste devant nous. Or il semble bien que la situation sociale et historique actuelle, qui est pour le moins tumultueuse, soit propice aussi à ce genre de remise en question. Pourquoi ? Simplement parce que ce système capitaliste, de plus en plus verrouillé et dont la gouvernance se révèle tous les jours plus catastrophique, est en train de se révéler dans toute sa logique. Il se révèle tel qu’il est, maintenant que le processus de destruction des systèmes de répartition des richesses s’accélèrent. Devant cela il y a peut-être en germe la prise de conscience que ceux à qui a été laissée la décision ont failli depuis bien longtemps, ne pouvait que faillir, de toutes les façons. Ajoutons, sur ce point, qu’une démocratie représentative est en soi une absurdité. Il ne peut y avoir de démocratie que radicale, directe, bref, où chacun participe à la définition des règles. ( La démocratie n’a souvent été qu’à de rares moments, souvent dans les moments insurrectionnels.)

Il devient de plus en plus évident que ce qui gouverne depuis maintenant plusieurs décennies, et promu par le projet néolibéral, est le principe d’irresponsabilité. Mesurons le propos, cette évidence ne l’est pas pour les conservateurs et réactionnaires, pour qui rien n’est possible et qui ne travaillent qu’à les réduire, les possibles. Mais au-delà de cette frange, aujourd’hui majoritaire, on peut malgré tout avancer que des prémisses existent. Par le simple fait que l’avenir qui s’annonce, si rien ne change, ne sera qu’une longue succession de sacrifices que fait et devra faire la majorité d’entre nous, il sera de plus en plus clair que la légitimité de ceux qui gouvernent le sera d’autant moins. S’ils ne peuvent plus promettre que la gestion du déclin, l’avenir radieux s’étant évanoui, s’ils se retrouvent dans l’incapacité même de promettre quoi que ce soit, deviendra de plus en plus criant l’appel à auto-organiser notre présent. S’ils nous mènent dans le mur, s’ils ne servent qu’à imposer des sacrifices à la majorité, pourquoi devrions nous leurs obéir? telle peut être la question. Les possibles sont là, la contestation du pouvoir décisionnaire, à tous les échelons de la société, a un avenir. L’appropriation de ces pouvoirs décisionnaires par le peuple est faisable, quoiqu’en pensent tous les pisse-vinaigres. Un exemple parmi d’autres ? Ce mouvement des professeurs des lycées du 93, qui a quelque chose de singulier par rapport aux manifestations habituelles. Un potentiel s’y exprime, susceptible de contester la manière dominante d’aborder les questions. Et cela n’est qu’un exemple parmi de nombreux autres.

M.D

Chronique-prémisses.

Cette petite phrase de Jacques Rancière, la déposer ici, au chaud : « La politique n’est pas faite de rapports de pouvoir, elle est faite de rapports de mondes » (Dans La Haine de la démocratie )

Françoise.

14/02/2010 17:27


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