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Bruits, Voix, Verbe. Musique. N°511

Écrit par sur 4 janvier 2012

Assis sur le seuil de l’année, je me fais un plaisir de reprendre cette émission de Canal Académie. Une fois n’est pas coutume.

http://www.canalacademie.com/emissions/pag910

Michel Serres] Car, dit la rédactrice, il est « difficile de lire un texte de Michel Serres sans avoir à l’oreille la musique de sa voix ». Je suis d’accord. Ecouter le bruit posé des mots qu’il prononce, le verbe, la parole, franchement je ne m’en lasse pas. Quel professeur est-il encore! Dans “Musique” au singulier, son dernier livre, Michel Serres y loue la musique, l’expression la plus complète de l’humanité. Il pose la question de la musique sur le plan philosophique: « Qu’est-ce que c’est que cette bête qu’est la musique? ».

« Dans cette absence de sens, il se joue quelque chose d’extraordinaire » dit-il. « La musique est originaire parce qu’elle n’a pas de sens, mais elle a tous les sens.(…) Elle peut supporter la totalité de l’âme ». « C’est pourquoi la parole si elle n’est pas supportée par la musique de l’éloquence elle n’a pas de sens« .

Bruits, Voix, Verbe, sont les trois parties du livre, trois variations qui convergent, conspirent, consonent. La musique vient du corps, de notre intérieur, du monde, et de nos sociétés : trois origines pour un même langage, Le vrai langage du monde et des vivants, selon ses mots.

Serres qui préfère être entendu que lu, sa « philosophie acoustique » dit-il, rappelle l’essentiel: la musique est l’art fondamental. La musique est l’universel. Mais de quel universel est-il? Pas de culture sans musique, pas de civilisation sans musique. La musique ordonne l’univers. C’est dans la communication, il suffit de ton oreille pour entendre la musique, on a l’universalité là.

Avec son accent chantant, héritier de la langue d’oc, Michel Serres a du tonus . D’ailleurs pour lui « le tonus c’est le son du corps, c’est le ton« . Parfois même, ça ressemble aux toulousains Fabulous Trobadors -qui eux-mêmes reprennent les formes du chant occitan. « Pas de code sans force, pas de force sans code, pas de dur sans doux et réciproquement. Pas de forme sans matière, pas de matière sans forme. Pas de message sans support, pas de cire sans codage. Voilà le concret. (…) Cela se nomme Musique, cette mer immense qui baigne et inonde le Monde, berce les vivants qui pullulent, bouleverse les humains, foules et cultures, mer où plongent les personnes et leurs émotions, mer Musique dont les ondes acoustiques, envahissant l’Univers, sonnant l’universel du sens avant que quiconque s’exprime, consolent qui pleure et, de joie, dilatent qui loue. »

Encore. Tiré de « Musique« :
« Au commencement mondial, le bruit ; la Musique le lisse ; Au commencement de l’Humain le Mal ; la Musique m’en délivre ; A tout recommencement, une sortie d’enfer. Orphée apprend à composer. »
« D’abord, la voix, le chant, puis le rythme sans lequel tout retombe dans le brouhaha du monde. »
« … le corps compte sans savoir les nombres. Sciences : la tête sait qu’elle compte, elle nomme ses nombres ; la musique compte au moyen de nombre sans nom. Débordés par le bruit, nous ne pourrions sans la musique dénombrer cet innombrable. »
« La Musique n’est pas un savoir mais un puits d’où sortent toutes les inventions possibles. Ainsi la philosophie. »
« La Musique accède ici à un statut original, universel, colossal, où son potentiel originel avoisine et recouvre parfois les sources primordiales des objets inertes eux-mêmes, des vivants et de l’information. (…) Oui, la Musique a toujours accompagné ou précédé, en les faisant entendre, l’émergence des signaux, et, je vais le dire, de la pensée algorithmique et de la science en général. Comme si le Grand Récit s’entendait comme une immense rhapsodie. Elle sonne donc aux dimensions du Monde. Et du savoir de ce Monde. »

Nous partageons tous ici le bonheur de “vivre” la musique, chacun avec sa sensibilité. Depuis Brest, par co-voiturage et nuit parisienne chez un copain, Romain, notre ingénieur du son et réalisateur, et Gaelle, notre fine lectrice à l’antenne de belles citations philosophiques, pour ces fêtes sont allés entendre l’Orchestre de Paris dirigé exceptionnellement par Boulez à la salle Pleyel. Qu’en partage pour bien commencer l’année, ils nous recommandent de voir et d’écouter.

Pour ces fêtes encore, et sur le même registre musical, mes amis de Lieux-dits m’ont offert un joli livre qui présente des annotations de Castoriadis saisies sur le vif de sa pensée. Parmi l’une de celles-ci (je déchiffre) est écrit ceci: « La musique crée un cosmos. » Donc « donne forme au Chaos« .

Beau programme. En ce qui nous concerne.

D.D


Les opinions du lecteur
  1. françoise   Sur   5 janvier 2012 à 16 h 37 min

    1) Où peut-on trouver des boutures de l’arbre que tu as mis en photo? Peut-être que les voisins qui portent plainte contre nos arbres seraient plus… seraient moins…bref.

    2) « La Musique n’est pas un savoir mais un puits d’où sortent toutes les inventions possibles. Ainsi la philosophie. »
    On pourrait rajouter « Ainsi la poésie. »
    Quant au carnet 21 dont tu parles, Nikos Papastergiadis, écrit dans sa préface:
    « Throught his life, Castoriadis was an admirer of aesthetic innovations and a lover of jazz. Octavio Paz and Milan Kundera were among the circle of his artistic friends. »

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