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« Intelligence collective » N°579

Écrit par sur 8 mai 2013

Ayant assisté il y a peu à un « Breizh café » il me semble utile de vous en faire part. Dit tout de suite : peu de rapport avec un bar breton. Sinon qu’il y a du café. Et qu’on y discute un peu comme dans un café. C’est un rassemblement pour « l’intelligence collective ». Du moins d’où devrait émerger de l’intelligence collective. Nouveau concept de management communicationnel (sans le dire).

Des règles et principes sont affichés : « concentrez-vous sur ce qui importe, communiquez vos pensées, vous idées, ouvrez votre esprit et votre cœur, écoutez dans le but de comprendre, associez des idées et créez des liens, écoutez ensemble quelles sont les idées et les questions profondes, jouez, griffonnez, dessinez –il est favorable d’écrire sur les nappes ! »

Première question : « comment vous voyez-vous habiter, travailler, circuler, échanger…en 2050 en Bretagne ? « La seconde : « Qu’est-ce que je fais déjà, où je connais déjà qui s’inscrit dans cette vision ? La troisième : « Quelles actions prioritaires je souhaite mettre en place et avec qui ? »

Deux cent cinquante personnes se sont mises ainsi à plancher. Un peu. Durée pour chaque question, une vingtaine de minutes. A partager à cinq ou six par table. A chaque question, on change de table et de personnes. Une restitution succincte est présentée à la salle. En trois mots par table.

Le thème du jour : le « plan bâtiment durable breton » (rénovation énergétique des bâtiments) initié par la Région. Parmi les participants : des élus, des représentants de structures environnementales et les professionnels de la construction. Panel assez large. Assez grand brassage de « compétences » et de points de vue.

Commentaire. La nouveauté -ou anecdote- réside dans le concept : »intelligence collective ». Institutionnellement soutenu. Dans son intervention, Patrick Massiot, Président de Région, déclare en introduction qu’en ce qui concerne les économies d’énergie « Tout le monde en parle mais qu’est-ce qu’on constate ? Pas grand chose ! Pourtant il y a urgence : chômage, précarité, facture d’énergie ».

D’où une intention volontariste. Avec pour objectif : que la Bretagne montre l’exemple. Une suite est donnée à la journée par la constitution de groupes de travail. Un prochain rendez-vous est fixé dans 6 mois. Bref, cette journée était consacrée à mobiliser un premier cercle des gens qui iront dire aux autres. Plus qu’à y collecter des idées neuves. Qui d’ailleurs se sont faites particulièrement discrètes. Tellement discrètes que les seules choses qui en sont sorties de ce panel très éclectique (aussi bien des producteurs, des concepteurs, et des investisseurs), ne correspondent qu’au discours institutionnel convenu. Qui impose les clichés du « prêt-à-penser ». Qui ne soulève aucune réticence. Mais à priori ce qui compte pour les organisateurs dans cette réunion c’est le petit pas, l’avancée modeste dans la pénétration de la culture de l’économie énergétique. C’est-à-dire le nerf de la guerre économique.

L’enjeu. Et d’un, nous connaissons tous que la Bretagne est énergiquement déficitaire. Depuis plus de trente ans. Et de deux, selon les prévisionnistes de l’Insee, elle connaîtra un accroissement de population de 24 000 habitants chaque année. Jusqu’en 2040. D’où le recours à « l’intelligence collective ». Bref, comment faire face se dit le maçon au pied du mur quand les moyens ne sont plus ce qu’ils sont. Du coup ça nécessite de nouveaux artisans dignes de ce nom. Problème: il en existe de moins en moins aujourd’hui, parce que l’évolution du capitalisme a détruit tout sens dans le travail. Qui peut s’investir et où s’impliquer durablement dans un travail de nos jours?

A cette intention d’auto-limitation, qui arrive sur le tard, nous ne pouvons ici qu’y souscrire. Compte tenu de notre passé. Mais pour un point de départ il aurait pu cependant être abordé la question de l’oubli. Pour prendre appui sur un bon sol rien de plus facile que de répondre à cette question de l’oubli de cette auto-limitation énergétique. Depuis trente ans, comment et pourquoi cet oubli de notre approvisionnement énergétique a-t-il autant organisé un si fort taux d’équipement en chauffage électrique ? Réponse: les bretons ont bel et bien été encouragés à s’équiper de cette manière afin que la région puisse rejoindre la moyenne nationale de consommation électrique par foyer. Objectif d’Etat: planification atteinte depuis deux ou trois ans. Sans condition d’isolation efficace requise. Dit autrement: que l’Etat n’ait plus le pouvoir de diriger l’économie, ne serait-ce que par sa maîtrise du crédit et du système bancaire ou de ses producteurs d’énergie (EDF, Total, etc.), tous ces postes essentiels cédés au capitalisme spéculatif, mérite quelques explications. Pour commencer. A moins qu’il convienne de recouvrir « l’oubli ». D’ailleurs l’absence -si peu remarquée- à cette journée inaugurale du Préfet de Région annoncé comme co-initiateur de cette journée, en est devenu risible. Précision: depuis Sarko, celui-ci a toutes prérogatives pour déterminer à sa guise ses priorités régionales dans la politique de l’Etat. A-t-il été froissé d’avoir été pris de cours par l’initiative régionale ?

Mais arrêtons-nous sur ce nouveau concept: « l’intelligence collective« . Ce qui signifie que l’époque de l’Intelligence qui descend verticalement semblerait révolue. Seule l’intelligence collective permettrait une économie innovante. Cela pourrait être la bonne nouvelle de ces temps de crise, l’innovation innove ! Non plus conçue par le haut, par des ingénieurs et du marketing, mais émergeant de réseaux, d’échanges de savoirs, d’amateurs passionnés. On serait passé d’un processus hiérarchique, produit par le haut pour redescendre vers les applications, à l’« innovation ascendante ». Les technologies numériques (via Internet) auraient permis ce renversement. Du coup, le pari est qu’une possible infrastructure de la contribution pourrait se développer à partir d’une sorte de bouillon de culture. A suivre.

Donc, pour l’innovation : l’intelligence collective ! Considérant le thème mobilisateur ça peut être un des meilleurs laboratoires de recherche. Mais ayant plutôt vu le nez de l’assemblée collé sur le court terme, et l’oubli de l’oubli, comme le dit Edgar Morin : « Je doute de l’intelligence Collective … qui s’autoproclame collective »…

D.D


Les opinions du lecteur
  1. Françoise   Sur   9 mai 2013 à 8 h 20 min

    Benasayag raconte que les Indiens d’Amérique du Sud ont coutume de dire qu’il n’y a que les poissons morts qui nagent avec le courant.

    Imaginer tous ces fonctionnaires de l’état, ces élus se prêtant au jeu de « ces représentants de l’horreur qui a pour nom « nouveau management » (autant de personnages qui agissent d’après leur rôle, leur identité et qui obéissent aux ordres ) » (Benasayag), étiquette autour du cou et changeant de table à un signal donné (coup de sifflet ou charmante hôtesse qui frappe dans ses jolies petites mimines ?) me navre et me révolte…
    Les ordres ?

    Des règles et principes sont affichés dir la Chronique : « concentrez-vous sur ce qui importe, communiquez vos pensées, vous idées, ouvrez votre esprit et votre cœur, écoutez dans le but de comprendre, associez des idées et créez des liens, écoutez ensemble quelles sont les idées et les questions profondes, jouez, griffonnez, dessinez –il est favorable d’écrire sur les nappes ! »

    Me navrent ? me révoltent ? m’humilient…

    « ouvrez votre cœur »
    « Il est favorable d’écrire sur les nappes »

    Comment peut-on supporter de telles injonctions ?…Comment ne pas dénoncer cette stupidité collective se pliant à des méthodes sectaires ?

    Une société à la dérive…Fenêtre sue le chaos…Castoriadis, au secours !

    Ce que l’on n’a pas précisé à ces 200 ou 300 personnes, c’est qu’un autre manager va être chargé d’évaluer l’intelligence collective de ce groupe de façon à en mesurer le R.O.I…(retour sur investissement) !!!!

    Et la Bretagne dans tout ça ?…

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